Profession: Anonyme
Une fois n'est pas coutume, nous nous intéressons aujourd'hui, loin des fracas du monde politique à un fait de société qui a pris de l'ampleur avec le développement des canaux de communication: la calomnie. Le paysage médiatique mauritanien, y compris la presse écrite, fourmille depuis quelques années d'écrits "accouchés sous X'. L'anonymat que permet la communication sur internet ne serait-il pas un aphrodisiaque ? se demandait d'ailleurs Walter Goodman. Quand on voit la façon dont cette déferlante anonyme épingle, expose et indispose ses victimes en les traînant dans la boue on est tenté de répondre par l'affirmative. Plus grave, cette littérature trouve facilement des oreilles attentives et des relais puissants dans une société de colportage comme la nôtre. Autant il était compréhensible à une époque récente que des anonymes aient permis de dénoncer sans pression et surtout sans risque d'en payer le prix les dysfonctionnements de notre société, avec il est vrai quelques excès, autant il est difficile d'admettre aujourd'hui que de pâles copies continuent à perpétuer un genre dont ils ne maîtrisent ni les tenants ni les aboutissants dans le seul but de régler les comptes à certains ou de polémiquer. Quelle attitude adopter face à ces attaques? Écouter le conseil de Sainte-Beuve au poète : " Veux-tu te venger, ô poète, des railleries de l'imbécillité et des insultes de la haine? Grave-les dans ton cœur, n'y réponds jamais. Fais ton œuvre, poursuis comme sans entendre, et pourtant aie en toi l'aiguillon d'avoir entendu" ou bien chercher à se justifier chaque fois qu'on est épinglé pour avoir la conscience tranquille. Sur un autre registre voisin les sites internet, les forums de discussion sont prisonniers d'un faux débat, de fausses polémiques. A voir certains sites et forums on a l'impression d'assister à une guerre de tranchées. Tout y est question de bidhanes, soninkés, haratines, haalpulaar et wolofs. Aucun débat sérieux, aucune analyse pertinente. Tout y est sur-exaltation de la différence. Souvent les seuls échanges qui semblent tenir la route sont préfabriqués. A peine eut-on avancé une thèse, qu'on revient quelques minutes plus tard pour la démolir sous un autre pseudo. Le temps est venu pour ces anonymes de sortir de la "clandestinité". Loin de moi l'idée de fustiger tous ces anonymes. Il en existe de bons et de méchants. Depuis des temps immémoriaux de grandes oeuvres ont traversé les siècles et continuent aujourd'hui encore à nous fasciner sans qu'on puisse leur attacher le moindre nom. "Les Mille et Une Nuits", dont l'héroïne principale Schérazade évolue dans un univers féerique fait partie de ces oeuvres restées dans la postérité, mais ses auteurs dorment,anonymement, dans les recoins de la civilisation perse. On peut multiplier les exemples de ce type dans tous les autres domaines de la vie. Mais de nos jours, l'anonyme et le pseudonyme sont utilisés à d'autres fins et même la presse dite "sérieuse" n'y échappe pas. Chers anonymes ne faites pas de votre anonymat une profession. Si vous assumez ce que vous dites et écrivez, votre crédibilité n'en sera que plus grande et votre propension à la calomnie considérablement réduite. Si vous vous trompez, déjugez-vous à temps. Si vous cherchez la notoriété demandez à X-Ould-Y: quelle satisfaction personnelle peut tirer un anonyme de sa célébrité, si ce n'est le sentiment du devoir accompli tel celui qui s'acquitte de son aumône sans en faire la publicité? Si tel n'est pas le cas, ça doit être rageant de ne pas pouvoir crier sur le toit: " c'est moi!".
Diaw Alassane
extrait de l'excellent blog de Monsieur Diaw Alassane
extrait de l'excellent blog de Monsieur Diaw Alassane
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